Marchés publics – relever les erreurs dans les documents de marché ?

Lorsqu’une entreprise souhaite participer à une procédure d’attribution de marché public, elle doit examiner correctement les documents de marchés (avis, cahier spécial des charges, annexes éventuelles, etc.) puisque ceux-ci feront, en cas d’attribution, intégralement partie du contrat.

Or, en cas de manquement à ses obligations, l’entreprise en question s’expose à engager sa responsabilité contractuelle et pourrait être sanctionnée.

Dès lors, que doit faire une entreprise si elle souhaite participer à un marché public mais découvre dans l’un des documents établis par le pouvoir public, des éléments irréguliers, des erreurs, des omissions (par exemple, l’entreprise doit démontrer qu’elle a déjà exécuté cinq marchés semblables à celui envisagé mais dont le coût moyen est 10 fois supérieur à celui espéré ou encore, il est prévu une cession de droit intellectuel qui implique également la cession du droit de paternité sur l’œuvre) qui font qu’elle ne peut pas déposer une offre de prix sérieuse ?

Dans ce cas, l’arrêté royal du 18 avril 2017 « relatif à la passation des marchés publics dans les secteurs classiques » prévoit que l’entreprise le « signale immédiatement par écrit au pouvoir adjudicateur. Celui-ci est en tout cas prévenu au plus tard dix jours avant la date ultime de réception des offres, sauf impossibilité résultant de la réduction du délai de réception des offres.

Le pouvoir adjudicateur apprécie si l’importance des erreurs ou omissions relevées justifie un avis rectificatif ou une autre forme de publication adaptée et, s’il y a lieu, de prolonger le délai d’introduction des offres ».

Si, malgré cette remarque, le pouvoir public ne modifie pas ou ne précise pas ses documents de marché, l’entreprise a le choix : soit elle participe tout de même à la procédure d’attribution. Si elle obtient le marché, elle sera toutefois tenue par les clauses du contrat, sauf à démontrer leur illégalité devant un juge ou en tentant de renégocier le contrat amiablement avec le pouvoir public.

Soit elle renonce à participer à la procédure et pourra éventuellement demander une réparation pour le manque à gagner, également devant un juge ou via une transaction.

Si le pouvoir public décide de modifier ses documents de marché, elle pourra soumissionner en paix sur cette question.

Enfin, soulignons que si elle ne prévient pas le pouvoir public du problème, elle pourra toujours soulever l’illégalité d’un document de marché devant le juge judiciaire, en invoquant par exemple la responsabilité extracontractuelle du pouvoir public, par le biais de l’exception d’illégalité (article 159 de la Constitution, voy. Trib. civ. Charleroi du 19 juin 2019, inédit).

L’Etat et la Propriété : Le droit public économique par son histoire (1830 – 2012)

« L’Etat et la Propriété : Le droit public économique par son histoire (1830 – 2012) », de Dimitri Yernault, préfacé par Guy Vanthemsche

Dans sa thèse de doctorat, l’auteur se livre à une analyse de la « constitution économique » de la Belgique depuis les racines de l’indépendance du Royaume jusqu’à aujourd’hui.

Les idées-maîtresses développées dans cette thèse sont que :

-L’intervention de l’Etat dans l’économie belge existe depuis l’origine, même au moment le plus « libéral » du XIXe siècle. Cette intervention est conditionnée par le pragmatisme des dirigeants, qui n’obéissent pas à des théories économiques mais répondent aux problèmes concrets que le système connaît à un moment donné. Les formes de cette intervention sont également très pragmatiques, puisqu’elles peuvent s’opérer par des concessions ou des délégations à des particuliers, le traitement en régie d’un service public, la création d’un être juridique de droit public particulier, ou d’un être mixte, ou encore par la prise de participation ou de contrôle de personnes morales de droit privé.

-Ces interventions de l’Etat belge ne sont pas juridiquement conditionnées à une carence de l’initiative privée, contrairement à ce qu’affirme une partie de la doctrine qui s’aligne sur l’exemple français. La loi fixe en principe la limite de l’intervention de l’administration dans l’économie. Les pouvoirs locaux, essentiellement les communes, propriétaires d’une part substantielle de la voirie, sont les plus entreprenantes dans ce domaine. Leur intervention se fonde sur la très large autonomie locale que la Constitution leur laisse.

-Enfin, le droit de l’Union européenne, par l’adoption des règles de passation des marchés publics, l’interdiction des aides d’Etat et le contrôle du droit budgétaire et des finances publiques par le système européen des comptes, crée un corset juridique qui limite considérablement les interventions publiques décrites ci-dessus.

Le texte se divise en trois parties historiques : la première, composée des années d’origines jusqu’à la fin de la Première Guerre Mondiale, la deuxième qui court jusqu’au début des années 1980 et la dernière qui se poursuit aujourd’hui.

Les deux premières parties livrent au lecteur un condensé des textes de droit public économique qui ont émaillé la période. La dernière partie examine les évolutions du système confronté au droit mondialisé (de l’Union européenne, mais pas seulement). Au terme de chaque grande période, les rapports de l’Etat avec la propriété (en tant que propriétaire mais également comme autorité encadrant, adaptant, répartissant, protégeant la propriété privée) sont examinés afin de pouvoir dessiner la Constitution économique de la Belgique.

Sortie du manuel « Principes de droit administratif » (2e édition)

Les éditions Larcier viennent de sortir la deuxième édition du manuel « Principe de droit administratif » du Professeur Durviaux, sur lequel j’ai eu l’occasion de collaborer, notamment en rédigeant une partie relative au domaine public de l’administration.

Le manuel est composé de la manière suivante:

Introduction générale
1. Les principes

Les actes juridiques de l’administration
2. Les actes et procédés unilatéraux
3. Les contrats

Les fonctions de l’administration
4. La police administrative
5. Le service public

Les moyens de l’administration
6. La fonction publique
7. Les biens

Les limites et le contrôle de l’administration

8. La responsabilité des pouvoirs publics
9. Le contrôle de l’administration
10. Le Conseil d’État

Budget d’une collectivité publique

Le budget d’une collectivité publique est un acte préparé par le pouvoir exécutif mais adopté par le pouvoir législatif (ou représentatif) de celle-ci. Il en existe principalement au niveau de l’Etat fédéral, des Communautés et des Régions, des Communes, des Provinces et des CPAS.

Il s’agit d’un acte destiné à prévoir les recettes et les dépenses pour l’année à venir et qui donne l’autorisation au pouvoir exécutif de dépenser les montants spécifiés.

Le budget est soumis au principe de l’annualité (il est voté chaque année), de l’unité (un seul débat est organisé pour prévoir et autoriser toutes les recettes et les dépenses), de l’universalité (l’intégralité des opérations budgétaires sont portées au budget) et de la spécialité (les dépenses autorisées sont individualisées).

Le budget ne doit pas être confondu avec la comptabilité nationale (SEC2010).

Partenariat public-public

Le partenariat « public-public » est une forme de coopération entre pouvoirs publics « purs » (c’est-à-dire sans l’adjonction de capitaux privés (à comparer avec le partenariat public-privé)).

Une telle collaboration peut prendre de multiples formes et gérer de nombreux types de projets.

Le choix du partenaire public n’est pas forcément soumis à la législation sur les marchés publics ni aux règles de transparence et de publicité (cf.: exception « in house » ou coopération horizontale, articles 30 et 31 de la loi du 17 juin 2016 « relative aux marchés publics« ).

Subvention

La subvention est une aide versée par un pouvoir public en vertu  d’une loi qui en précise la nature, l’étendue, les modalités d’utilisation et les justifications à fournir par son bénéficiaire.

La subvention est « organique » lorsqu’elle est prévue par une loi ordinaire. Elle est « facultative » lorsqu’elle est directement prévue par la loi budgétaire.

Il est possible qu’une subvention altère les règles de concurrence et soit alors qualifiée d' »aide d’Etat« , ce qui la rend en principe illégale au regard du droit de l’Union européenne.

A la différence d’un marché public, la subvention n’est, en règle, pas accordée dans le cadre d’un contrat mais d’un acte unilatéral de l’autorité publique.

Régie

Une personne morale de droit public peut confier la gestion d’un service public à une personne privée ou à une personne publique ad hoc (recours à des formes complexes telles que la concession de services, le marché public ou encore le partenariat public-privé (PPP)…).

Le service public peut également être exécuté directement par le pouvoir public sans avoir recours à une personne juridique distincte. On parle alors d’une régie « de fait » ou d’une gestion en régie du service public.

Contrat BOT

Le contrat « build operate transfer » est un contrat administratif d’origine anglo-saxonne.

Il s’agit d’un des contrats centraux des opérations de Partenariats public-privé (PPP).

(B) Il permet à l’autorité publique de demander d’abord à une entreprise privée de construire à ses frais une structure destinée au service public (un parking, un tunnel reliant deux villes, comme le Tunnel sous la Manche…).

(O) Ensuite, l’entreprise privée est chargée d’exploiter cette construction pendant un certain nombre d’années, ce qui lui permet d’amortir son investissement.

(T) Enfin, l’entreprise privée concède au pouvoir public la propriété de l’exploitation à la fin d’une période pré-établie. Le pouvoir public obtient ainsi la jouissance de la structure, avec le personnel formé pour exploiter le service.

Un tel contrat complexe est habituellement qualifié de concession en droit continental.

Le contrat BOT est souple et peut se décliner en plusieurs variantes (par exemple: obligation de racheter le bien en fin de contrat, simple location pour l’usage de l’entreprise privée, etc.).

L’impact budgétaire du contrat BOT, s’il est bien conçu, peut être neutre ou très limité en vertu des règles budgétaires européennes (SEC 2010), contrairement au contrat de marché public.